La Maison Du Bilan, Neuropsychologie et psychologie clinique à Paris 9

Que faire quand un proche évoque une envie de suicide ?


L’irruption de la crise suicidaire dans l’existence d’un proche est une déflagration. Elle ouvre un abîme sous les pieds de l’entourage, confronté soudainement à une angoisse existentielle et à un sentiment d’impuissance paralysant. Le temps se distord, l’urgence s’impose, et les questions se bousculent dans un chaos émotionnel et cognitif : Que faire ? Qui appeler ? Comment trouver les mots justes face à une souffrance qui semble défier le langage lui-même ? Cette expérience, souvent vécue dans l’isolement et la sidération, place les proches en première ligne, dans un rôle de « sentinelle » non choisie, pour lequel ils ne sont que rarement préparés.

Loin d’être un acte impulsif ou une décision rationnelle, la crise suicidaire est l’aboutissement complexe d’un processus multifactoriel, une manifestation aiguë d’une souffrance psychique devenue intolérable. Pour l’entourage, naviguer dans cette tempête requiert bien plus que de la bonne volonté. Cela exige une compréhension minimale des mécanismes psychiques à l’œuvre, une connaissance des signaux d’alerte, et, de manière cruciale, une maîtrise de l’écosystème de soin et de soutien disponible. En France, un maillage de ressources, bien que perfectible, existe pour répondre à cette urgence sanitaire et humaine. Cet article se propose de cartographier de manière exhaustive et clinique ces dispositifs, non pas comme un simple annuaire, mais comme un guide opératoire pour l’entourage. Il s’agira de décrypter la nature de la crise, d’outiller les proches pour l’intervention immédiate, de détailler les structures de soin et d’accompagnement, et enfin, d’aborder la question essentielle du soutien de l’entourage lui-même, maillon indispensable mais souvent fragilisé de la chaîne de prévention.

A. Comprendre la Crise Suicidaire : Une Perspective Clinique pour l’Entourage

Avant d’énumérer les ressources, une étape fondamentale consiste à déconstruire la notion de « crise suicidaire » pour en saisir la dynamique psychique. Cette compréhension est le socle qui permet à l’entourage d’adopter une posture juste et efficace, dénuée de jugements ou de réactions contre-productives.

La crise suicidaire n’est pas synonyme d’un désir de mort en tant que tel. Elle est plus précisément l’expression d’un désir d’arrêter une souffrance perçue comme insupportable, inextinguible et interminable. Le psychologue Edwin Shneidman a conceptualisé cette douleur sous le terme de psychache, une souffrance psychique intolérable liée à la frustration de besoins psychologiques fondamentaux (appartenance, autonomie, estime de soi). Lorsque cette psychacheatteint un seuil critique, la mort peut apparaître, non pas comme un objectif désirable, mais comme la seule échappatoire envisageable à cette douleur.

Un concept central pour l’entourage est celui de l’ambivalence. La personne en crise suicidaire est presque toujours partagée entre des raisons de vivre et des raisons de mourir. Elle oscille entre le désir d’en finir avec la souffrance et l’espoir, même infime, que les choses puissent s’améliorer. Cette ambivalence est la faille dans laquelle l’entourage et les soignants peuvent s’engouffrer. Chaque geste de soutien, chaque parole validante, chaque ressource mobilisée vient peser sur le plateau de la balance du côté de la vie. Comprendre cela permet de ne pas interpréter les moments de repli ou de rejet comme une décision finale, mais comme une fluctuation dans cette lutte interne.

La crise suicidaire se caractérise également par une constriction cognitive. Le champ de la pensée se rétrécit dramatiquement. La personne ne voit plus qu’une seule option (le suicide) à un seul problème (la souffrance). Les pensées deviennent rigides, dichotomiques (tout ou rien, toujours ou jamais), et la capacité à envisager des solutions alternatives est anéantie. Le rôle de l’entourage et des professionnels est alors de servir de “lobe frontal externe”, en aidant à rouvrir le champ des possibles, à réintroduire de la nuance et à envisager d’autres issues, même si elles semblent inaccessibles à la personne à cet instant.

Enfin, il est impératif de démanteler certains mythes tenaces qui paralysent l’action :

  • Mythe 1 : “Parler du suicide peut donner l’idée à quelqu’un.” C’est l’inverse qui est validé par la recherche. Aborder le sujet directement, avec calme et sans jugement, montre à la personne qu’elle est entendue, que sa souffrance est reconnue, et cela peut être le premier pas vers la recherche d’aide. Le silence, à l’inverse, renforce le sentiment d’isolement.
  • Mythe 2 : “Ceux qui en parlent ne le font pas.” La grande majorité des personnes qui décèdent par suicide ont exprimé leurs intentions ou leur mal-être à leur entourage ou à un professionnel de santé dans les semaines ou mois précédant leur passage à l’acte. Toute évocation, même semblant anodine ou manipulatrice, doit être prise au sérieux.
  • Mythe 3 : “Quand une personne a décidé de se suicider, rien ne peut l’arrêter.” Comme mentionné, l’ambivalence est quasi-constante. L’accès au soutien, la limitation de l’accès aux moyens létaux et le traitement des troubles sous-jacents (dépression, anxiété, etc.) sont des facteurs de protection extrêmement efficaces. La prévention est possible et fonctionne.

B. La Détection des Signaux : Le Rôle de Sentinelle de l’Entourage

L’entourage est souvent le premier, et parfois le seul, à pouvoir observer les changements subtils ou manifestes qui peuvent précéder une crise. Endosser ce rôle de “sentinelle” ne signifie pas devenir un expert en diagnostic, mais développer une sensibilité accrue aux signaux d’alerte. Ces signaux peuvent être classés en trois catégories.

1. Signaux verbaux :

  • Messages directs : “Je veux mourir”, “Je vais me suicider”, “Vous seriez mieux sans moi”, “Je n’en peux plus de souffrir”, “Bientôt, tout sera fini”. Ces expressions ne doivent jamais être banalisées ou considérées comme de la simple provocation.
  • Messages indirects : “Je suis un fardeau pour vous”, “Il n’y a pas d’issue”, “À quoi bon continuer ?”, “Je me sens piégé”. Ces phrases témoignent du désespoir, de la perte de sens et de la vision en tunnel caractéristiques de la constriction cognitive.

2. Signaux comportementaux :

  • Rupture avec les habitudes : Un changement brutal et inexpliqué dans le comportement est un indicateur majeur. Cela peut inclure :
    • Isolement social et repli sur soi : Refus de voir ses amis, d’aller au travail, abandon des loisirs et des activités auparavant appréciées (anhédonie).
    • Changements dans les habitudes de sommeil ou d’alimentation : Insomnie persistante ou hypersomnie, perte d’appétit ou hyperphagie.
    • Négligence de l’apparence physique ou de l’hygiène.
    • Consommation accrue d’alcool, de drogues ou de médicaments.
  • Comportements préparatoires :
    • Recherche d’informations sur les moyens de se donner la mort.
    • Acquisition de moyens létaux (médicaments, arme, etc.).
    • Mise en ordre de ses affaires : Rédaction d’un testament, dons d’objets personnels de valeur, rédaction de lettres d’adieu.
    • Prise de contacts inhabituels : Appels ou visites à des proches pour dire “au revoir”, de manière plus ou moins explicite.
  • Amélioration soudaine de l’humeur : Un calme ou un apaisement soudain après une longue période de dépression ou d’agitation peut être un signe de très grand danger. Cela peut indiquer que la décision de passer à l’acte a été prise, apportant une forme de “soulagement” paradoxal.

3. Signaux contextuels et émotionnels :

  • Événements de vie stressants : Rupture sentimentale, deuil, perte d’emploi, diagnostic d’une maladie grave, difficultés financières majeures, harcèlement.
  • Expression d’émotions intenses et persistantes : Désespoir, culpabilité écrasante, honte, sentiment d’échec, colère, irritabilité, anxiété extrême.
  • Antécédents : Une tentative de suicide antérieure est le prédicteur le plus important d’un futur passage à l’acte. Des antécédents familiaux de suicide ou la présence d’un trouble psychiatrique (dépression, trouble bipolaire, schizophrénie, trouble de la personnalité limite) augmentent également le risque.

L’identification de ces signaux n’est pas une science exacte. C’est souvent l’accumulation et la convergence de plusieurs d’entre eux qui doivent alerter. La clé pour l’entourage est de faire confiance à son intuition : si un comportement semble inquiétant, il l’est probablement.

C. L’Intervention Immédiate : Le Dialogue et l’Évaluation du Risque par l’Entourage

Une fois les signaux repérés, l’étape suivante est d’entrer en contact. C’est souvent la plus intimidante. L’objectif n’est pas de “résoudre” le problème, mais d’ouvrir un espace de parole sécurisant, de valider la souffrance de la personne et d’évaluer le degré d’urgence pour mobiliser l’aide adéquate.

1. Comment engager la conversation ?

  • Choisir le bon moment et le bon lieu : Un endroit calme, privé, où vous ne serez pas dérangés et où vous aurez du temps.
  • Exprimer son inquiétude de manière factuelle et bienveillante : Utiliser le “je” pour éviter un ton accusateur. Par exemple : “J’ai remarqué que tu sembles très triste/fatigué(e) ces derniers temps, et je m’inquiète pour toi.” plutôt que “Pourquoi est-ce que tu es tout le temps déprimé(e) ?”.
  • Écouter activement : Laisser la personne parler sans l’interrompre. Utiliser des reformulations (“Si je comprends bien, tu ressens…”) pour montrer que vous écoutez et comprenez. L’écoute est en soi une intervention thérapeutique.
  • Valider les émotions, pas le projet suicidaire : Il est crucial de reconnaître la légitimité de la souffrance. “Cela doit être terriblement difficile de ressentir tout ça”, “Je comprends que tu souffres au point de ne plus voir d’autre solution”. Cette validation est essentielle pour créer un lien de confiance. Elle ne signifie pas que l’on est d’accord avec l’idée du suicide.

2. Poser la question directement : C’est le point le plus important et le plus redouté. Il faut poser la question du suicide de manière claire et directe. L’hésitation ou l’utilisation d’euphémismes peut créer de la confusion.

  • Exemples de formulations : “Est-ce que tu penses au suicide ?”, “Avec tout ce que tu traverses, est-ce que tu as parfois des idées de mort ?”, “Est-ce que tu as pensé à te faire du mal ?”.
  • Si la réponse est oui, il faut rester calme. La personne vient de vous faire confiance. Il s’agit maintenant d’évaluer le niveau de danger.

3. Évaluer l’urgence (pour orienter l’action) : L’entourage peut se baser sur un modèle simple pour estimer le niveau de risque, non pas pour poser un diagnostic, mais pour savoir s’il faut une aide professionnelle immédiate. On peut explorer trois niveaux :

  • Idéations (les pensées) : “Depuis quand as-tu ces pensées ? Sont-elles fréquentes ?”
  • Plan (le scénario) : “Est-ce que tu as pensé à une façon de le faire ? As-tu un plan précis ?” La précision du plan (quand, où, comment) est un indicateur de risque élevé.
  • Moyens (l’accès) : “Est-ce que tu as ce qu’il faut pour mettre ton plan à exécution ?” L’accès à un moyen létal (médicaments stockés, arme à feu, etc.) augmente drastiquement l’imminence du danger.

Si la personne a des idées suicidaires, un plan élaboré et un accès aux moyens, la situation est une urgence médicale absolue. Il ne faut en aucun cas laisser la personne seule et il faut immédiatement contacter les services d’urgence.

D. Les Ressources d’Urgence et les Structures de Soins Spécialisées en France

Le système français offre plusieurs portes d’entrée pour la prise en charge d’une crise suicidaire. Il est crucial de les connaître pour ne pas perdre de temps.

1. L’Urgence Absolue : Le Danger est Immédiat Si la personne est en train de faire une tentative de suicide, si elle a un plan précis et imminent, ou si son état de détresse est tel qu’elle représente un danger pour elle-même :

  • Le SAMU (15) ou les Sapeurs-Pompiers (18) :Ces services doivent être contactés sans délai. Il est important de décrire la situation calmement et précisément : la personne est-elle consciente ? A-t-elle absorbé des substances ? Est-elle blessée ? Précisez qu’il s’agit d’une crise suicidaire. Le régulateur du SAMU pourra envoyer une équipe médicale (SMUR) pour une prise en charge sur place et un transport sécurisé vers un service d’urgence hospitalier.
  • Les services d’urgences générales : Ils sont le point d’accueil pour toute urgence vitale. Une fois la situation somatique stabilisée, une évaluation psychiatrique sera systématiquement réalisée par un psychiatre de liaison ou par l’équipe des urgences psychiatriques.

2. L’Urgence Psychique : La Crise est Aiguë mais le Danger n’est pas Immédiat Si la personne a des idées suicidaires intenses, une grande angoisse, mais sans plan d’action immédiat, plusieurs options sont possibles :

  • Le 3114 - Numéro national de prévention du suicide : Lancé en 2021, ce numéro est la pierre angulaire du dispositif. Accessible 24/7, gratuit, il est opéré par des professionnels de santé (infirmiers, psychologues) spécifiquement formés à la crise suicidaire. Ils peuvent :
    • Offrir une écoute et un soutien immédiat à la personne en crise et à son entourage.
    • Évaluer le niveau de risque.
    • Orienter vers la structure la plus adaptée.
    • En cas de danger imminent identifié lors de l’appel, ils peuvent déclencher l’intervention des secours d’urgence.
  • Les Centres d’Accueil Permanents (CAP) ou Urgences Psychiatriques : Présents dans les grands centres hospitaliers, ils accueillent sans rendez-vous, 24/7, toute personne en souffrance psychique aiguë. Un psychiatre et une équipe soignante réalisent une évaluation approfondie et peuvent décider d’une hospitalisation (libre ou sous contrainte si nécessaire) ou d’une orientation vers un suivi ambulatoire intensif.
  • Le médecin traitant : Il est souvent le premier interlocuteur et connaît bien le patient. Il peut réaliser une première évaluation, prescrire un traitement pour soulager l’anxiété ou la dépression, et surtout, adresser rapidement son patient à un psychiatre ou à une structure spécialisée.

3. Le Soutien et l’Écoute à Distance Ces lignes d’écoute sont précieuses pour rompre l’isolement, tant pour la personne en crise que pour son entourage, à tout moment du jour ou de la nuit :

  • SOS Amitié (09 72 39 40 50) : Ligne d’écoute généraliste historique, tenue par des bénévoles formés à l’écoute empathique.
  • Suicide Écoute (01 45 39 40 00) : Spécifiquement dédiée à la prévention du suicide, cette association offre également une écoute bienveillante et un soutien.

Il est important de noter que ces lignes sont des ressources de soutien et non des services d’urgence médicale. En cas de danger immédiat, le 15 ou le 18 restent les numéros à composer.

E. L’Accompagnement au Long Cours : La Prévention de la Récidive

La fin de la crise aiguë n’est que le début du processus de rétablissement. Le risque de récidive est particulièrement élevé dans les mois qui suivent une tentative de suicide. L’accompagnement au long cours est donc fondamental, et l’entourage y joue un rôle de soutien majeur.

1. Les Structures de Soins Ambulatoires :

  • Les Centres Médico-Psychologiques (CMP) :Ce sont les structures de soin psychiatrique publiques de secteur. Ils offrent des consultations gratuites avec des psychiatres, psychologues, infirmiers et assistants sociaux. Le CMP est le pivot du suivi post-crise. Il assure la continuité des soins, le suivi thérapeutique, la gestion du traitement médicamenteux et la coordination avec les autres acteurs du soin.
  • Les psychiatres et psychologues libéraux : Ils offrent une alternative au secteur public, avec souvent des délais d’attente plus courts mais un coût (partiellement ou non remboursé). Le choix du thérapeute et du type de thérapie (TCC, analytique, systémique…) doit se faire en accord avec la personne concernée.
  • Les Hôpitaux de Jour (HDJ) : Ces structures proposent une prise en charge intensive sur la journée (ateliers thérapeutiques, groupes de parole, suivi individuel) tout en permettant à la personne de rentrer chez elle le soir. C’est une alternative intéressante à l’hospitalisation complète.

2. Le Rôle Actif de l’Entourage dans le Suivi :

  • Soutenir l’adhésion au traitement : Aider la personne à se rendre à ses rendez-vous, à prendre son traitement, sans pour autant devenir infantilisant.
  • Participer aux entretiens familiaux : Si le thérapeute le propose, ces entretiens peuvent être très utiles pour comprendre la dynamique familiale, exprimer les difficultés de chacun et trouver des modes de communication plus sains.
  • Élaborer un plan de sécurité conjoint : Le plan de sécurité est un outil clinique concret, élaboré avec le thérapeute, la personne et si possible l’entourage. Il liste :
    1. Les signes précurseurs d’une nouvelle crise.
    2. Les stratégies personnelles de la personne pour faire face (ex: écouter de la musique, appeler un ami).
    3. Les personnes et lieux qui peuvent apporter une distraction et un soutien.
    4. Les personnes ressources à contacter en cas de besoin (amis, famille).
    5. Les professionnels à contacter (thérapeute, CMP, 3114).
    6. Les services d’urgence à appeler.
      Ce plan permet de redonner du pouvoir d’agir à la personne et de structurer la réponse de l’entourage en cas de nouvelle alerte.
  • Sécuriser l’environnement : De manière non intrusive et en accord avec la personne, il peut être nécessaire de limiter temporairement l’accès aux moyens létaux (mettre sous clé les médicaments, les armes, etc.).

F. Le Soutien à l’Entourage : Prévenir l’Épuisement et le Traumatisme Vicariant

Accompagner un proche en crise suicidaire est une épreuve psychologiquement éprouvante. L’entourage est exposé à un stress chronique, à un sentiment de culpabilité, à de l’anxiété, de la colère et à un risque élevé d’épuisement compassionnel, voire de traumatisme vicariant. Il est fondamental que les aidants prennent également soin d’eux-mêmes pour pouvoir continuer à soutenir leur proche efficacement.

1. Reconnaître l’Impact Psychologique :

  • L’hypervigilance : Une surveillance constante du proche, une peur panique à chaque silence ou porte fermée.
  • La culpabilité : “Qu’est-ce que j’ai raté ?”, “Qu’aurais-je dû faire de plus ?”.
  • Le sentiment d’impuissance : Face à une souffrance qui semble hors de portée.
  • L’isolement : La peur du jugement social et la difficulté à parler de cette situation taboue.

2. Les Ressources Spécifiques pour l’Entourage :

  • Le 3114 : Ce numéro s’adresse aussi explicitement à l’entourage en quête de conseils, de soutien ou simplement d’une écoute pour déposer son propre fardeau.
  • Les associations de familles et de proches :
    • L’Unafam (Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques) : Propose des groupes de parole, des formations pour les aidants, un soutien téléphonique et une aide pour naviguer dans le système de soins. C’est une ressource incontournable.
    • Les associations de prévention du suicide : Certaines, comme Phare Enfants-Parents, proposent un soutien spécifique aux familles.
  • Les groupes de parole pour l’entourage : Partager son expérience avec d’autres personnes vivant une situation similaire peut être extrêmement déculpabilisant et ressourçant. Les CMP ou les associations peuvent orienter vers ces groupes.
  • Un soutien psychologique individuel : Il n’y a aucune honte pour un proche à consulter un psychologue pour lui-même, afin de pouvoir gérer le stress, la peur et l’impact de la situation sur sa propre santé mentale.

3. Les Ressources pour les Endeuillés par Suicide (Postvention) : Lorsque le pire survient, l’entourage est confronté à un deuil particulièrement complexe, marqué par le traumatisme, la culpabilité et le questionnement. La postvention est une forme de prévention qui vise à soutenir les endeuillés pour prévenir l’apparition de deuils pathologiques ou de comportements suicidaires au sein de la famille.

  • Jonathan Pierres Vivantes : C’est l’association de référence en France pour l’accompagnement des familles et proches endeuillés par suicide. Elle propose des groupes d’entraide, un soutien téléphonique et des sessions d’information.

Prendre soin de soi n’est pas un acte égoïste, mais une condition sine qua non pour pouvoir être un soutien durable et solide pour son proche.

Conclusion

La confrontation à la crise suicidaire d’un proche est une épreuve qui mobilise des ressources psychiques, émotionnelles et pratiques considérables. La réponse ne peut et ne doit pas reposer uniquement sur les épaules de l’entourage. Comme nous l’avons vu, la France dispose d’un écosystème de soin structuré, allant de l’intervention d’urgence absolue aux dispositifs d’accompagnement au long cours et de soutien aux familles. La clé réside dans la connaissance de ce réseau et dans la capacité à l’activer à bon escient.

Le parcours de l’aidant est un cheminement qui va de la détection intuitive des signaux d’alerte à un dialogue courageux, de la mobilisation des secours professionnels à un soutien patient et constant dans la durée. Il implique de passer d’une posture de “sauveur” potentiel, souvent épuisante et irréaliste, à celle de “partenaire” de soin, qui accompagne, facilite et soutient, tout en reconnaissant les limites de son rôle et en s’appuyant sur l’expertise des professionnels.

Enfin, il est impératif de souligner que chaque maillon de cette chaîne est essentiel. La formation des sentinelles, la fluidité des parcours de soin, la disponibilité des lignes d’écoute, le soutien indéfectible aux familles et aux endeuillés sont les composantes d’une politique de prévention du suicide efficace. Pour l’entourage plongé dans la tourmente, savoir que ces ressources existent, qu’une main est tendue, est déjà en soi une lueur d’espoir. Car si la souffrance peut isoler, c’est bien la force du lien – qu’il soit familial, amical ou thérapeutique – qui constitue le plus puissant antidote au désespoir.

Les sources :

Bardon, C., & Piau, C. (2021). Crise suicidaire : évaluation et prise en charge. La Revue du Praticien, 71(8), 875-881. https://www.larevuedupraticien.fr/article/crise-suicidaire-evaluation-et-prise-en-charge

Courtet, P., & Jaussent, I. (2018). Prévention du suicide : de la recherche à la pratique clinique. L’Encéphale, 44(6), 541-547. https://doi.org/10.1016/j.encep.2018.10.003

Debout, M. (2020). Le suicide, un tabou français. Éditions de l’Atelier. (Note: Bien qu’un livre, cet auteur est une référence majeure en suicidologie en France, ses travaux s’appuient sur des décennies de recherche clinique et épidémiologique.)

Gouvernement Français. (2021). Dossier de presse - Lancement du 3114, le numéro national de prévention du suicide. Ministère des Solidarités et de la Santé. https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/dp_-_lancement_du_3114_-_vdef.pdf

Granboulan, V., & Jardon, V. (2017). Les proches face au risque suicidaire. Soins Psychiatrie, 38(313), 28-32. https://www.em-consulte.com/article/1159828/les-proches-face-au-risque-suicidaire

Lanteri, C., & Walter, M. (2019). Postvention : quel soutien pour les personnes endeuillées après un suicide ?. Soins Psychiatrie, 40(320), 40-44. https://doi.org/10.1016/j.spsy.2019.01.010

Santé publique France. (2023). Suicide : données nationales et régionales. https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/sante-mentale/suicide/donnees/

Shneidman, E. S. (1993). Suicide as psychache: A clinical approach to self-destructive behavior. Journal of Consulting and Clinical Psychology, 61(4), 549–553. (Note: Article fondateur sur le concept de psychache, non français mais essentiel pour la compréhension clinique).

Unafam. (s.d.). Nos missions pour les proches. Consulté le 20 mai 2024, sur https://www.unafam.org/nos-missions

Vaiva, G., & Berrouiguet, S. (2018). Stratégie digitale et prévention du suicide. In P. Courtet (Ed.), Le Geste suicidaire. Lavoisier Médecine Sciences. https://www.lavoisier.fr/livre/medecine/le-geste-suicidaire/courtet/3673051


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